ANCOVART LILLE

Pschiiiiiit ! Ça y est, elle coule dans des verres à son nom, la Mont des Cats. On va enfin savoir si la seule bière trappiste de France mérite le battage médiatique qu’on a fait autour d’elle. Premier constat : elle est ambrée. Pour le reste, faisons confiance à Jef Van den Steen, zythologue (l’oenologue version bière) et auteur de deux livres sur les moines et leur bière. La barbe déjà plongée dans le verre, le Flamand y va de son accent rocailleux : « Au nez, il y a du jambon de Bayonne. Ensuite, il y a une touche de caramel. Très vite, le houblon arrive. » Verdict : « C’est une bière trappiste comme il n’y en avait pas avant. C’est une bière très originale. Elle est sèche, très désaltérante.

 » Ouf. La Mont des Cats vient de réussir son examen de passage. Le frère Bernard Marie qui l’a présentée à la presse hier peut respirer. Sa bière est portée sur les fonts baptismaux par des experts qui n’auraient pas hésité une seule seconde à la tailler en pièces.

C’est que nos voisins d’outre-Quiévrain contestent le statut de bière trappiste française à notre Mont des Cats nationale. Ah, les vilains cocardiers ! « Je trouve que cette bière est aussi française que le Mouton-Cadet est gantois », assène sans pitié Alain Dremière, un journaliste de la RTBF.

Brassée en Belgique

Et on ne peut pas lui donner complètement tort. Pour l’heure, sept bières au monde disposent du précieux logo « authentic trappist product » : la Chimay, l’Orval, l’Achel, la Westvleteren, la Westmalle, la Rochefort (toutes belges) et une néerlandaise, la Trappe. Toutes répondent à un drastique cahier des charges. Elles sont produites dans l’abbaye trappiste qui les commercialise et les bénéfices vont au profit d’oeuvres sociales.

Le hic (c’est le cas de le dire), c’est que la Mont des Cats n’est pas brassée... au mont des Cats. Ce sont les moines trappistes de l’abbaye de Scourmont en Belgique qui s’y collent. Ils s’y connaissent, ils produisent la Chimay. « J’espère qu’elle sera tout aussi bonne », sourit Philippe Henroz, responsable marketing des bières de Chimay.

Titillé par des journalistes belges qui ne rigolent décidément pas quand on leur parle de bière, le frère Bernard Marie tranche : « C’est une bière trappiste brassée dans une abbaye trappiste selon une recette trappiste. (...) Peut-être qu’un jour, nous envisagerons de construire une brasserie.

 » Ce qui ne serait pas une hérésie puisque les moines de l’abbaye du mont des Cats ont produit de la bière de 1848 à 1911.

Pour l’heure, les frères trappistes espèrent surtout se refaire une santé financière. « Aujourd’hui, il paraît nécessaire de trouver un deuxième revenu pour que l’avenir de la communauté soit assuré. Avec la bière et le fromage, nous marchons sur deux jambes. » Jeudi prochain, la bière sera commercialisée dans la boutique de l’abbaye (1,90 euros pour 33 cl, un peu plus de 4 euros pour 75 cl). D’autres diffuseurs devraient suivre. Après l’avoir goûtée, vous ne devriez pas avoir envie de repartir sur une jambe. •

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Consommez avec modération.